dimanche 28 avril 2019

Rue des coteaux.

Aujourd'hui je suis passée en bus devant là où je vivais avec mon ex.
Avant, un fantôme de sentiment s'emparait de mon estomac et mes poumons et m'envoyait en flashback.

C'est pas à lui que je pensais quand je passais par là. C'est à moi. Moi pendant quatre ans.

Et je me rends compte que la honte et l'embarras que je ressentais en repensant à ces années avec lui ne venaient pas du fait que je ne l'aimais plus lui.
C'était parce que je ne m'aimais pas moi.

Ma flemme de ranger cet endroit de plus en plus sale, cette relation qui ne me convenait pas, mes angoisses grandissantes, mes journées vides, mes manques d'intérêt, mon corps que je masquais, mes journées passées à pleurer, mes états dépressifs.

Toutes ces images qui me sautaient auparavant à la gorge sont restées immobiles aujourd'hui.

Je me suis rendue compte que moi du passé s'en est pris plein la gueule pour que moi du présent et du futur aient des leçons apprises en stock et des cicatrices intérieures bien pansées.

Dire que cette fille là c'était pas moi, c'est nier tous les petits traumas en cascade qui me sont tombés dessus et que j'ai surmontés . C'est faire comme si ma résilience n'existait pas.

J'ai envie de serrer cette fille là dans mes bras. Et de lui dire merci.

Aujourd'hui je suis passée en bus devant là où je vivais avec mon ex.

mardi 23 avril 2019

24h chrono





Samedi soir j'ai croisé des yeux bleus (décidément on dirait que j'ai une certaine ligne éditoriale), j'ai croisé un rire j'ai croisé une possibilité et je me suis dit que peut-être qu'un pas en territoire redevenu inconnu ne me ferait pas de mal, que peut-être que je pouvais laisser les rires nerveux regagner mon corps, peut-être peut-être peut-être que.

Dimanche soir il m'a invitée à le rejoindre. Et très vite au lieu de tomber dans mon bon vieux cycle, à chercher son attention là où elle se dirigeait vers une autre, à ne pas m'écouter, à modifier le cours de ma soirée, je me suis rendue compte que lui faisait partie de ceux pour qui celle qui le rejoindrait dans son lit serait interchangeable avec n'importe quelle autre et je ne veux plus jouer à ça.

S'apprécier pour une nuit, oui. Mais le vouloir alors, le vouloir vraiment ce corps là, cette personne là. Pas ramener quelqu'un dans son lit à défaut de devoir dormir seule. Pas ramener un corps sans tenir compte du fait qu'il y a quelqu'un dedans.

Alors j'ai passé la soirée avec deux de ses amies. A l'ignorer du coin de l'oeil. Et quand il venait vers moi je le voyais gros comme une maison dans laquelle je n'avais pas envie d'entrer.

Quitte à avoir un coup d'un soir cette nuit là, j'ai choisi des copines d'un soir.

Et au final, quand tout s'additionne, je crois que je me choisis moi.

lundi 15 avril 2019

Fille à mecs.

Un jour à quinze ans, alors que je portais mon pull de l'émission jackass pendant une heure de cours, le garçon assis derrière moi m'a interpelée à voix basse.
"Hé Meredith..? T'aimes bien jackass?"
"Oui."
"Et t'aimes bien les jeux vidéos?"
"Oui"
"Mais...t'es un garçon manqué en fait."
Je me souviens de l'admiration dans sa voix et d'avoir noté cette interaction sur mon blog.

Mon enfance et mon adolescence étaient marquées par mon envie d'accentuer mon côté masculin. Parce que les garçons c'est plus cool que les filles. Parce que les filles c'est des putes. Parce que moi jsuis pas une vraie fille. Jsuis mieux. Parce que moi mon papa il m'a appris à pas pleurer. Parce que moi je pleure jamais tu vois. Jsuis pas une vraie fille. Jsuis mieux.

Ma relation avec mon ex a été marquée par mon entrée dans un milieu très masculin, et j'ai endossé à la fois dans cette relation amoureuse et mes amitiés un rôle de mère amie. Une envie de plaire platoniquement, une envie d'être nécessaire à la survie de ces mecs. A leur dire de boire de l'eau. A leur dire de partager leurs émotions. A me plaindre d'eux en roulant des yeux juste pour souligner le fait que moi je suis une des rares filles de la bande. Moi jsuis pas une vraie fille. Jsuis mieux.

Et même après la rupture, quand les jupes se sont faites plus courtes et les conversations plus longues, mon besoin d'être utile, de materner, d'être approuvée se marquait de plus en plus.
"Et moi je suis qui dans la bande?"
"Bah t'es la fille!"
Moi jsuis pas une vraie fille. Jsuis mieux.
Quand la petite amie d'un ami de ma bande qui me rencontrait pour la première fois m'a demandé de qui j'étais la copine j'ai failli recracher ma bière en riant.
Moi j'suis pas la meuf d'un des gars de la bande. Je suis la meuf. Jsuis pas une vraie fille. Jsuis mieux.

Ca m'a mis des mois à cesser d'accorder plus d'importance aux déclarations d'amitié de mes amis garçons que celles de mes amies filles. De cesser de valoriser à ce point tout ce que les garçons de mon entourage me disent de positif. De me détacher de ce rôle de mère amie que personne ne m'a demandé d'endosser. C'est pas parce que je suis utile qu'on m'aime. On m'aime parce que je suis moi.

Moi jsuis une vraie fille. Jsuis moi.

dimanche 7 avril 2019

Le décennat.

16

Je me souviens en détails du printemps et de l'été de mes seize ans.
Un tas de premières fois. Des dernières premières fois.
Je ressens toujours cet émerveillement pur. Regarde le ciel regarde les gens écoute la musique entends ce rire regarde le ciel regarde le ciel regarde le ciel.
Jamais blasée jamais habituée.
Je suis tombée amoureuse d'une idée du bruit d'un skateboard d'un cycle naissant sous la forme d'un garçon.
Tout était lumineux et je crois que la lumière venait de moi.
Je crois qu'elle est encore là, je crois qu'elle est revenue.
Dix années au tic tac discret, dix années de changement pour au final avoir fait un looping et retrouvé l'essentiel.
Au fond de mon coeur il y a une fille de seize ans qui danse.


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