dimanche 26 juillet 2020

J'existe.






Mon cerveau m'a mis les larmes aux yeux en sortant de chez les filles. Il a failli le refaire, assise seule sur le tapis de chez Arthur.
Mon cerveau panique et je dois le rebooter, un peu, beaucoup, parfois, trop.

Moi et mon cerveau craintif on existe seulement parce que deux jeunes adultes de vingt ans se sont rencontrés en boîte de nuit. Elle y a été pour la première fois de sa vie. Lui c'était un gros sorteur. Elle l'a ramené à la maison pour le présenter à sa mère au petit matin. En tout cas c'est ce que ma grand-mère m'a dit. Ils se sont aimés et puis rien ne se crée, rien ne se perd, tout se transforme et leur amour s'est métamorphosé, les je t'aime ont quitté leurs bouches pour aller vers d'autres oreilles.

Et moi j'existe.

J'existe, un dimanche soir, un vingt-six juillet (veille de mon numéro préféré, celui que je jouerais aux jeux de hasard si j'aimais ça) deux mille vingt, j'existe, mes cheveux attachés en chignon qui s'en fout, en culotte et pull rouge et chaussettes hello kitty, assise sur mon lit, dürüm en main, comédie romantique en face des yeux, j'existe parce qu'à un moment il y a eu de l'amour et mon cerveau lui il a trop souvent peur. Alors je le leurre mon cerveau. Je lui chuchote des gentilles choses. Mais je perds patience et parfois je crie.

J'existe, par le plus grand des hasards, en même temps que d'autres êtres tout aussi hasardeux, qui m'aiment d'un amour grandiose, plus beau que dans les films, plus vrai que dans les livres, qui cuisinent avec moi, qui rient avec moi dans l'herbe, qui courent avec moi dans les rues.

J'existe sur une planète où il y a des mangues, du chocolat, des montagnes qui s'en foutent du temps qui passe, des océans terribles, des arbres centenaires qui me toisent.

J'existe en même temps que le wifi, que le paiement sans contact, que des révoltes dans les rues et sur petit écran, que Beyoncé et qu'une pandémie.

J'existe parce qu'il y a eu de l'amour dans une boîte de nuit un soir dans Bruxelles et il y en aura encore, encore plus longtemps que les montagnes.

mercredi 22 juillet 2020

Les chemins et les signes.




Quelque part à Rome, entre le quartier de Monti et la piazza di Spagna vendredi en début d'après-midi, je déambule, un peu perdue, un peu perdue exprès, et très heureuse, sans rien dans les oreilles, à écouter les bruits de la ville.  Je dépasse une fille en une robe rouge, et je la recroise plus loin dans une rue en travaux.

Je la dépasse.

"Excuse me?"
Je me retourne. 
Elle me complimente sur mes vêtements et ma coiffure, dit que "it's very soulful". Je la remercie en italien, elle me demande si je suis d'ici.

J'avais passé la matinée à envoyer des messages à des amies à coups de "et si je m'installais à Rome? haha non hein ça sert à rien je suis très bien à Bruxelles y'a pas de raison. Bon aller peut-être si j'arrive pas à lancer mon asbl d'ici un an. Bon aller peut-être quoiqu'il arrive."

Je le lui dis.
"Mais c'est un signe! Je t'ai vue et je me suis dit que je devais te parler. Quand je t'ai recroisée je me suis dit que c'était un signe et que je devais absolument te parler. J'ai cru que tu étais romaine et toi tu veux venir vivre à Rome."

Je lui demande si elle a faim. On déjeune ensemble en parlant des moments où l'Univers à l'air de nous envoyer des signes, et que peut-être qu'on est en train d'en vivre un , là.

Parce qu'à chaque fois que je mets un pied là bas j'en reviens bouleversée pendant des jours, à me demande si je devrais y aller ou pas et à toujours me raviser avec des arguments qui émanent plus de la zone de confort que de la logique.

J'ai un nouveau but.

dimanche 12 juillet 2020

Il est l'heure de rentrer.





Il y a quelques années j'aurais encore repris une bière après que la musique se soit tue et j'aurais bu aucun soft entre. 
J'aurais essayé coûte que coûte  de me mettre à côté de lui et j'aurais bien veillé à être celle qui parle le plus fort entre elle et moi.
J'aurais accepté avec enthousiasme sa proposition de tous continuer à aller faire la fête chez lui et j'aurais lutté contre le sommeil en espérant finir dans son lit.

Mais moi et mon petit coeur (mou, gentil, pas blasé) on a beaucoup appris:  alors j'ai fini mon verre, je lui ai rendu son pull et il m'a rendu mon pull et ma veste, je lui ai dit à bientôt en tenant son visage entre mes mains parce que je suis pas une meuf subtile, et je suis partie continuer ma soirée ailleurs. Et après cette escale j'ai suivi ma fatigue, tout droit, une rue à droite, encore tout droit jusque sur la place et à droite vers mon lit, seule et contente.

Je crois que maintenant je sais quand la fête est finie. Quand elle est encore belle et qu'elle commence à s'éteindre c'est l'heure de rentrer.  Je crois aussi que c'est une métaphore.

dimanche 5 juillet 2020

(in)stabilité






Je suis revenue des toilettes, je me suis ré installée à notre petite table tandis qu'il demandait du feu à des gens à côté de nous. Il a à peine eu le temps de se rassoir que j'ai attaqué: "Dis, juste une question avec mes gros sabots, mais tu veux qu'on rentre ensemble ou tu voulais juste boire un verre?  Si tu dis non c'est pas grave hein."
Il a souri, penché la tête et dit que oui, il osait pas demander mais qu'il voulait rentrer avec moi.
La lune a éclairé notre chemin du retour et à peine passée la porte on était dans les bras l'un de l'autre comme il y a quelques mois, à se dire les choses sans les ressasser dans nos cerveaux, à se sourire en parcourant nos corps, à se dire qu'on s'est manqués depuis décembre. On s'est demandé pourquoi c'est si simple de tout se dire si honnêtement, et la réponse c'est qu'on n'est pas amoureux l'un de l'autre. C'est simple. Il va partir vivre à la campagne. C'est encore plus simple.

Cette jolie surprise me donne envie de plus de jolies surprises, et je sais que je veux partir à la recherche de stabilité et que ce n'est pas là dedans que je veux la chercher ni la trouver. Je veux me trouver un nouveau cocon appelé maison et un nouveau quotidien qui me permettra de manger et couvrir ceux et celles que j'aime de petites attentions, mais je veux pas que ma quête de la stabilité me pousse dans des bras qui resteraient les mêmes pendant de longs mois juste pour me rassurer. Je me connais et je sais que ma tendance à vouloir certaines choses immédiatement même si elles sont bancales  ne fera que me déservir en ce moment.

J'entends l'été qui chante des chansons au loin, j'ai hâte de danser sur des airs inconnus avec des gens qui le sont aussi encore.