dimanche 7 janvier 2024

Dans la file de la friterie

 Samedi soir une scène tout droit sortie d'un court-métrage a pris place devant mes yeux dans la file de la friterie.


J'avais pas mis mes écouteurs, je regardais mon chien du coin de l'oeil pour qu'il n'aille pas chaparder une frite, et j'écoutais autour de moi voir s'il y avait quelque chose d'intéressant à se mettre dans l'oreille.

Devant moi un couple de jeunes anglais qui réfléchissaient à quelle sauce prendre.

"Andalouse?"

Moi j'allais prendre samouraï.

La fille se tourne vers son mec et lui sort une phrase construite au fur et à mesure qu'elle réfléchissait

"You know, how when people are kids, they want to become things...things they don't...they end up doing other things."

(tu sais, quand les gens sont enfants, iels veulent devenir quelque chose...quelque choses qu'iels ne...iels finissent par faire autre chose)

Leurs visages étaient éclairés par les néons de la friterie, mon chien essayait de regarder dans le sac de course du mec adossé au mur qui portait une écharpe de l'Union de Saint-Gilles et mon cerveau a trouvé ce moment mi poétique mi cinématographique et 100% réel.

Je pense que son mec ne comprenait pas trop où elle voulait en venir. Je me suis mordue la langue pour ne pas "faire un Dimitri" (si vous connaissez mon papa/si des gens lisent encore ici, vous savez) et je ne me suis pas immiscée dans sa reflexion mais elle avait raison et je comprenais ce qu'elle voulait dire et je comprenais son regard dans la vague de la personne qui se demande "mais qu'est-ce que c'est être adulte ne sommes nous pas en fait des enfants sur les épaules les uns des autres dans un grand manteau?" (ou 3 ratons laveurs, si tu me lis je t'aime).


Quand j'étais petite je voulais être maman. C'était écrit, dans mon carnet rose barbie, avec l'écriture tremblotante de mes cinq ans. "Quand je serai grande, je serai: ....maman..."

Couleur préférée: "Rose pale"

Flash forward, 31 ans le mois prochain, co-mère d'un chien avec mon amoureuse et mère en intérim pendant 5 minutes pour copines en crise existentielle qui me demandent les mêmes conseils qu'à l'adolescence.

Puis j'ai voulu être archéologue. J'ai fini par étudier ça par curiosité plus qu'autre chose et par en avoir marre et finir quand même, à bout de nerfs, le cerveau cramé par l'académique.

Et puis rock star. Ma guitare électrique prenait la poussière chez ma mère. Elle prend maintenant la poussière dans mon salon (si tu me lis, laisse la guitare je te JURE je vais en faire j'ai juste pas dit quand je t'aime merci).

Et puis à partir de la fin de l'université faire et être se sont mélangés dans mon cerveau et se sont à nouveau séparés et je ne suis pas ce que je fais et je ne fais pas ce que je suis.


Faire et être c'est pas la même chose.


J'espère que je vais recommencer à écrire souvent. Mon cerveau ne promet pas.

lundi 3 avril 2023

Ah oui il faut un titre

 J'ai dit à mon psy "Je vais tellement bien que je n'ai plus peur d'aller mal".


Comme si toutes les facettes de mon être avaient le temps de s'exprimer, aucune n'est muette, tout le monde parle chacun à son tour à quelques nanosecondes de différence, certaines voix se couvrent l'une l'autre un certain laps de temps mais tout le monde est là. Personne n'est dans sa grotte, personne n'a bousculé les autres pour prendre le devant.

Avec le recul je sais pas trop ce qu'était l'élément déclencheur de tout de chamboulement, heureusement comme toujours y'avait du beau dedans (surtout toi, tu vas le lire je le sais et je vois déjà ta petite moue), peut-être que c'était saturne peut-être que c'était la fin de ma vingtaine tombée dans le gouffre du covid peut-être que c'était tout qui bougeait très fort partout après deux années sur pause. En tout cas beaucoup de quilles sont tombées par terre, certaines vont rester au sol parce qu'elles n'ont plus d'utilité et d'autres vont pousser comme des fleurs.


Bref je vais très bien je vais même très bien et je pense que c'est important que je l'écrive même si ça ne va pas rester à postérité parce qu'un jour tout va disparaître, et tous les mots du monde aussi.


Mais c'est assez réconfortant je trouve.

dimanche 25 septembre 2022

Un canette de vers de terre

 En anglais y'a une expression "opened a can of worms" et je sais pas quel est son équivalent francophone because i am so bilingue mais en gros ça veut dire qu'on a ouvert un pot/ une canette de vers de terre et qu'ya pas moyen de le refermer.


Alors je suis pas sûre d'avoir envie de refermer le pot. Je crois que je préfèrerais créer du vermicompost. Mais il se trouve que depuis mercredi, suite à une séance psy, y'a plein de vers de terre anxieux qui sont en train de gigoter. Alors c'est ok, ça arrive, mais j'ai l'impression que là elle a fouillé dans mon cerveau et elle a rien refermé et c'est moi qui dois le faire. Sauf que je lui ai demandé des outils et elle m'en a pas donné. Ca fait un certain temps que cette thérapie est devenue plus conversationelle qu'autre chose mais j'ai l'impression qu'elle n'est plus neutre, elle me connaît presque trop. Je veux pas entendre des "ah oui c'est vrai que tu fais beaucoup ça, faut éviter" oui ok super mais donne moi une boîte à outils stp.


Bref j'ai donc pris la décision de changer de psy. Ca fait un peu peur c'est comme se dire qu'on sort d'une amitié mais qu'on sait pas trop comment dire à notre ami.e qu'en fait ça le fait plus et qu'on veut se trouver d'autres potes. Mais en attendant, je vais pas rester avec tous mes vers de terre là comme ça, ça va pas hein. Je fais mes tites méditations j'inspire un deux trois quatre je retiens un deux trois quatre cinq six sept j'expire un deux trois quatre cinq six sept huit, pensée intrusive in, pensée intrusive out, le reste de la journée se passe, pensée intrusive dans le bus, pensée intrusive sort du bus, le temps passe, pensée intrusive dans la cuisine, je bois une gorgée d'eau, pensée intrusive out. Alors ça va je me démerde je prends note des pensées, qu'est-ce qu'elles sont? Ah oui des pensées. Pas la vérité. Ok ça va. Mais j'aimerais quand même bien qu'elles viennent me visiter moins souvent, c'est même pas les vacances en plus, elles font quoi elles posent un jour de congé?

Qu'est ce que je vais faire de ce compost après? De très belles choses en tout cas.

mardi 13 septembre 2022

Faire et être.

 "Tu vas beaucoup faire. Et tu vas beaucoup être."


Ptet que je m'adressais un peu à moi-même aussi. Puis dans toutes les facettes de ma personne y'a de l'anxiété sociale en fond sonore une semaine avant la fête, et moi qui danse style contemporain sur du florence and the machine après avoir vu une perf surprise de ma meuf que j'a regardée avec un mix du loup de tex avery et l'émoji étoile dans les yeux, et moi en train de nettoyer le sol à l'eau le lendemain. Tout comme y'a moi qui cherche du taff et moi qui vais trouver un jour et moi qui apprend que ça ne me définit pas, y'a moi anxieuse des fois à imaginer des choses affreuses qui n'arrivent même pas et des fois je le suis pas et ça ne me définit pas.


Tu fais quoi dans la vie? Je fais et je suis et je fais beaucoup de choses et j'en suis plein encore.
Je suis une amoureuse une amie une podcastrice une poète une fille de une soeur une pote une meuf qui parle beaucoup une meuf qui écoute une meuf qui a peur de tout une meuf qui a peur de rien une meuf qui vit beaucoup.

lundi 29 août 2022

Nuage pressé

 Je sais pas comment résumer deux mois en quelques paragraphes, je sais pas trop pourquoi j'écris, je suppose que c'est pour moi, puis un peu pour traduire mon cerveau à celleux qui auraient envie de me lire.


Je sens que je suis à un tournant mais y'a un peu de brouillard on dirait. Et je crois que je suis responsable d'une partie du brouillard, ou bien c'est juste que je veux pas mettre mes lunettes et après je gromèle en disant "roh je vois rien". Je pense que c'est ça.


J'suis sensible aux chamboulements, je suis une espèce de petite balle magique, je pense. Elle bouge et après aaaaaaaa elle est catastrophée et elle fait des bonds alors que y'a vraiment pas de quoi.
Jsuis une cocotte minute qui crée sa pression toute seule alors que personne ne lui a rien demandé. J'aimerais être plus stable émotionnellement. C'est beau les émotions hein, c'est important, mais les sautes d'humeur c'est fatiguant pour moi et pour les personnes qui les subissent. 

Je sais pas exactement quelle version de moi je suis pour le moment mais on dirait qu'il y a la version de moi plus complète quelque part derrière, derrière de l'argile à briser, ou une couche à nettoyer je sais pas. J'accepte toutes mes facettes mais je suis pas d'accord que ce soit la râleuse qui vienne tout le temps faire la conductrice (en plus je sais pas conduire, même une autotamponneuse je la conduis mal).

Récemment j'ai pas mal de remises en question de comment je suis, comment je communique, comment je me comporte et ça fait pas mal d'infos à processer alors parfois ça active des alertes dans mon cerveau qui crient "ça passera jamaaaaaaais" "t'es une mauvaise persoooooonne" "on va t'abandonneeeeeeer" alors que c'est pas vrai cerveau, merci pour ton opinion mais là elle n'est pas utile au processus.


Je sais que personne n'est un petit soleil tous les jours, et je calcule mon baromètre aux crises d'anxiété et quand j'en fais rarement je me dis que tout est réglé mais AHA! Y'a pas que l'anxiété dans mon cerveau et des fois il se trouve que ma mauvaise humeur ou le fait que je suis désagréable ça n'y est pas lié, je peux prendre mes compléments alimentaires aux plantes, ça va rien y changer ce coup ci, je suis juste désagréable et de mauvaise humeur trop souvent et c'est mon humeur à régler et c'est pas à autres d'en subir les changements.


Voilà 29 ans et demi avec des râleries digne d'un.e enfant qui a pas fait sa sieste mais bon, au moins on me l'a fait conscientiser (merci je t'aime) et du coup maintenant à moi de prendre ça en main. Sans faire la cocotte minute ou la balle magique. Ca fait beaucoup de choses à process et je me sens un peu comme un nuage pressé qui est mis sur l'étendoir à sécher parce qu'il a libéré toute sa grise pluie et il veut redevenir gris par automatisme mais en fait il peut pas être que gris donc là il réfléchit un peu. 

Moi et mes métaphores hein.



vendredi 24 juin 2022

Grandir, encore

 Tout à l'heure pour me motiver à aller au festival j'ai fait un crochet par chez Quentin, comme il y a cinq ans.

J'ai de nouveau les cheveux courts, ils ont toujours leurs casquettes et leur dégaine de pseudo skaters, on crie toujours fort dans la fosse en dansant sur du rap, et en rentrant chez moi par la suite j'ai pensé à tout le chemin que j'ai parcouru du point A au point B, même lieu, 5 ans plus tard.

Y'a 5 ans j'entamais mon premier été de galères sentimentales, se casser la gueule c'est la voie express vers la sagesse mais moi j'ai mis du temps à comprendre le détail qui clochait (au revoir l'hétérosexualité), je buvais des bières spéciales entre deux bédos, j'étais à l'anniversaire d'un pote après le festival et je suis rentrée à pieds à 4h du matin.


Aujourd'hui j'avais mal au dos, j'ai les tempes qui deviennent doucement mais sûrement argentées, j'envoyais quelques messages à la femme que je veux épouser et à qui je veux fabriquer des croissants artisanaux et des tasses moi-même, j'étais entourée de deux meufs avec qui j'ai un projet extraordinaire, j'ai bu que du soft et de l'eau, et je suis rentrée peu après le coucher du soleil, parce que je sentais que j'étais pas d"humeur à rester.


J'adore grandir. Ca fait mal au dos. Mais c'est super.

lundi 16 mai 2022

Sous le vent

 Dimanche soir j'ai clôturé un week end que j'ai mis dans ma liste mentale des moments merveilleux (qui sont vraiment nombreux, dites donc) par un concert de Pomme et Safia Nolin dans une église.

Pendant qu'elles accordaient leurs guitares et que le son flottait du métallique au grâcieux je me suis rendue compte que pendant longtemps j'étais en train d'accorder mes instruments, mais que je savais pas trop vers quoi j'allais. Et qu'avant de jouer mélodieusement faut un peu se chercher, et que c'est normal et pas grave. Que des fois encore j'aurai l'impression d'accorder les sons et que c'est pas grave. 

Que des fois mes émotions vont encore déborder et que je peux les maîtriser tout en les laissant exister. Que c'est pas parce que je rationalise mes moments anxieux que je dois arrêter de me laisser ressentir les choses.

Le soleil passait à travers les vitraux, j'étais entourée de mes amies les plus proches et de mon amoureuse, Pomme et Safia chantaient sous le vent, l'espace temps n'existait plus vraiment et toutes les Meredith de toutes les époques étaient assises dans cette nef et se tenaient la main, fort.


Y'a quelques années j'aurais jamais cru avoir la vie que j'ai maintenant. Je l'imaginais même pas dans le champ des possibles. Et pourtant j'étais là, dans cette église. Et Pomme et Safia chantaient sous le vent.

Et j'ai pleuré, un peu.