lundi 2 avril 2018

A l'infini.

Adossée au muret qui sépare mon lit une place de ma cuisine, les jambes croisées, mes baskets roses à deux sous aveuglantes entremêlées, j'ai envie de pleurer.
J'ai envie de pleurer parce que j'ai l'impression de sentir mon âme cogner contre mes os, on dirait qu'elle essaie de sortir, comme un rayon de soleil qui transperce les nuages pendant quelques secondes un jour terne.
Dans brand new ancients, Kate Tempest dit au sujet de quelqu'un de vingt-cinq ans qu'il est à mi-chemin entre la non-existence et l'infini et tout d'un coup je sens l'infini  croître dans mes poumons, il repousse l'oxygène et l'air s'évapore par ma bouche. Il y a une femme dans son jardin qui fume une clope, elle regarde dans le vide et je me demande si elle aussi sent l'infini dans ses poumons, dans ses veines, dans ses mains. Dans le ciel il y a un avion qui se perd dans un énorme nuage gris qui le dévore pour son repas du soir. Les branches des arbres dansent en transportant délicatement des bourgeons qui mourront avant moi alors que leurs hôtes m'ont précédée et me survivront.
Je pense à toutes les théories qui tournent dans ma tête depuis mes huit ans et qui m'empêchaient de dormir enfant, mêlées à mon anxiété d'adulte dans mon corps qui avait encore des dents de lait.
Tout est cyclique et je suis dans un tourbillon dans lequel je peux décider de changer ma perspective.
Tout est cyclique et je peux trier le bon et apprendre du mauvais.
Tout est cyclique et plus je grandis moins je vieillis vraiment.
Je pense à tous ceux et celles dont j'ai croisé le chemin, le temps d'un regard en coin, le temps de se joindre par les hanches, par les lèvres ou par les mots. Le temps de s'impacter comme des astéroïdes et des satellites. Le temps de s'oublier et puis de se souvenir d'un prénom, un jour, dans un rayon de l'épicerie. Puis de l'oublier de nouveau une fois arrivé à la caisse. Le temps de s'aspirer et s'inspirer l'un l'autre, de se construire comme des âmes en kit, de prendre leur morceau favori, de manger leur plat fétiche, de m'approprier le bar qui est leur qg, le temps d'ajouter un petit pourcentage d'eux dans le puzzle de moi-même.
J'ouvre la bouche très grand mais mon âme ne sort pas. Elle a juste besoin de l'infini à l'intérieur de moi.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire