samedi 30 décembre 2017

Des étincelles.




"Enfin!" Jeanne s'est avancée vers moi en s'exclamant et m'a prise dans ses bras.
Je suis amoureuse de lui et je l'ai verbalisé sans y penser. 
Ca passera un jour. Dans quelques semaines. Dans quelques mois. Un jour.
Parce que lui, il ne m'aime pas. Il ne m'aimera pas. C'est pas le moment. Pas maintenant. Et "pas maintenant", ça veut dire jamais.

Peut-être que j'ai été amoureuse une seule fois, peut-être jamais, peut-être mille. Peut-être que j'ai tout enfoui dix fois, cent fois. Et mes mots sont tombés dans mes poumons, dans mon estomac, dans le bout de mes doigts, faisant couler leur poison. Alors j'ai senti les épines sur ma langue et je les ai fait sortir. Je suis amoureuse de lui. Je refuse de porter ces mots comme un fardeau. Ils se promèneront près de moi jusqu'à ce qu'il soit temps qu'ils partent. Mais je ne veux pas qu'il sache .Je veux que le pouvoir reste le mien.

Je me suis lancée dans le plus long monologue de mon existence.
On a reçu un pouvoir magique à la naissance, nous, les artistes. On est mortes mille fois et renées mille autres. Le triste devient tragique et le beau devient extraordinaire. On vit. Trop. Mais on vit. Et on a des histoires à raconter avec les outils que nos erreurs nous ont donné. Des histoires à raconter en nous-même. Que pour nous.
Pendant quatre ans et demi j'étais le petit nuage de fumée d'une bougie qui venait de s'éteindre. Puis je suis devenue un feu de forêt. Maintenant j'essaie de me maîtriser. De réchauffer ceux qui sauront quoi faire de moi. De ne pas immoler les autres.

Et j'ai peur. Je me force à me contenir encore un an. Peut-être deux. Peut-être dix. J'ai peur de vouloir re devenir une bougie éteinte. De ne plus avoir d'histoires à me chuchoter. Peur de redonner tous les mots à quelqu'un d'autre, quelqu'un qui aura de quoi les remettre dans le bon ordre et faire de moi une seule version de moi-même. La version la plus silencieuse, la plus effacée. La plus éteinte.

Le feu réchauffe, le feu brûle, le feu détruit. Le feu fait table rase pour qu'on puisse mieux reconstruire.

Je mets le feu à mon coeur.


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